Retour sur la remise en état de cette guitare au plus proche de l’origine. Dans un souci de conservation, toutes les pièces d’origines ont été remontées après avoir été restaurées, nettoyées.
restauration d'une epiphone crestwood de 1976
un peu d'histoire...
Cette guitare est un dérivé de la première gamme de solid body Epiphone en 1959 après l'ère Stathopoulos, car c'est en 1957 que Gibson rachète Epiphone. Cette gamme se compose à l'origine de la Coronet équipée d'un micro Epiphone New York, de la wilhire équipée de deux P-90 et de la Crestwood Custom équipée de deux mini-humbucker. Le corps est symétrique, double cutaway et la tête Epiphone avec la plaque métallique emboutie et des mécaniques 3+3. Dans le courant 1960 la Coronet passe du micro New York à un P-90 dog-ear en plastique noir, sans doute le stock de micro Epiphone est-il terminé. Ces guitares sont fabriquées en acajou, probablement du Honduras, le corps en une seule pièce et avec une touche en palissandre de Rio.
changement en 1963
La gamme est revue et l'apparence légerement modifiée, l'Olympic qui existait sous forme de Melody Maker Epiphone prend la nouvelle forme et se décline en un ou deux micros, la Coronet était passé du micro New York au P-90 autour de 1960 et conserve cette configuration ``junior``, la Wilshire se voit pourvu de deux mini-humbucker, la Crestwood Custom est identique mais orné d'une finition plus poussée avec binding de touche et repères ovoïdes. La Crestwood Deluxe est elle équipée de trois mini-humbucker.
Seventies...
La production de ces guitares s'achève en 1969. Gibson repositionne Epiphone comme sa marque abordable et la production qui était alors faite dans l'usine Gibson de Kalamazoo est délocalisée au Japon, à l'usine de Matsumoku à partir de 1970. La forme de 1963 reste mais la tête ``batwing`` disparait et l'on retrouve une tête 3+3. Le manche n'est plus collé mais vissé, en plusieurs partie. La gamme solid body se compose dans l'ordre de l'ET-275 équipée de deux humbucker et d'un vibrato, l'ET-276 est identique avec un stop-bar, l'ET-278 avec un tune o matic. En haut de gamme l'ET-290 avec tout l'accastillage doré, binding et repères rectangle et enfin celle qui nous intéresse l'ET 290 N. La gamme est agrandie avec une autre forme et l'ET-270 popularisée par Kurt Kobain.
la restauration...
En premier lieu, la guitare est démontée, toutes les vis repérées, nous faisons le tour du propriétaire: le manche est droit, le truss-rod fonctionne facilement et efficacement, les micros répondent, les frettes sont usées mais pas inutilisables et aucun trous ni cavité qui ne seraient pas d’origine n’ont été pratiqué ce qui est un bon point! Le corps de la guitare a été peint en noir puis passé grossièrement à la ponceuse et c’est là le point négatif, car je voudrais conserver le vernis d’origine avec la patine et les coups qu’il a pris mais des marques de ponceuse disgracieuses et des traces noires sont bien visibles. Heureusement après un test le vernis n’est pas, comme je le craignais un polyuréthane sur fondur, mais un vernis polyester ce qui va me permettre de travailler dans la masse du vernis. Je peux alors poncer correctement et très finement pour enlever les marques de ponceuse et de peinture tout en conservant le vernis et les coups d’usage. Je commence au grain 600, monte progressivement jusqu’à 4000, puis polish. Le résultat est comme escompté et le corps est prêt, exempt de marque de ponceuse mais ayant conservé sa patine.
Le manche lui n’avait pas été peint. Je le nettoie soigneusement et il retrouve le même lustre que le corps. Les mécaniques s’ouvrent, je les nettoie également avant de légèrement les graisser puis de les remonter et de les replacer chacune à leur place initiale.
La guitare est arrivée avec un pickguard noir en deux parties sans potentiomètre de contrôle. Heureusement le câblage d’origine ainsi que son pickguard étaient présents. Ce dernier avait été peint en noir, puis poncé grossièrement à la ponceuse, d’où de nombreuse rayures circulaires caractéristiques. Il a donc fallu le poncer convenablement pour éliminer les marques et obtenir un état de surface satisfaisant. Le chanfrein avait été endommagé, il a fallu également le refaçonner proprement. La couleur crème est elle apposée sur le dessous du pickguard, elle est visible par transparence, des traces noires et des manques de peinture l’avait bien terni. J’ai pris le parti de tout décaper sauf le monogramme E et j’ai refait une peinture de la même couleur.
Le câblage est testé et nettoyé, et seul le jack est à changer. S’ensuit son remontage, avec les micros.
La liaison manche/corps mérite d’être peaufinée, j’aplani donc proprement les deux surfaces en contact et réalise une cale en coin de toute la surface de la cavité pour donner 2° de renversement au manche. Une légère planification des frettes est nécessaire.
Commence alors le remontage avec toutes les vis nettoyées. Je monte les cordes, après un premier réglage d’approche du manche je règle l’action et l’intonation; un réglage plus fin du manche dans quelque jours viendra parfaire la guitare qui est déjà très confortable.
GALERIE
En conclusion...
Voici la guitare terminée et remontée dans sa configuration la plus proche de l'origine; le tune o matic avait été remplacé et j'ai changé le jack, quant aux knobs c'est là le seul anachronisme de cette Crestwood car ils sont de l'époque Kalamazoo. C'est une guitare intéressante qui peut être une alternative à une SG tout en ayant sa propre personnalité. L'ergonomie est très agréable et l'équilibre est bon, on joue facilement longtemps avec cette petite Epiphone vintage qui vibre beaucoup. L'accès aux aigus est très facile et le manche arbore un profil en C assez plat en haut du manche, jusqu'à très plat en bas. La lutherie est sérieuse, le corps tout en érable est atypique, en trois parties centrées et le manche en trois parties sur quartier avec touche rapportée réagit au moindre réglage du truss rod. Les micros sont étonnement polyvalents et assez brillants, associés aux potentiomètres très progressifs on sculpte le son précisément; ils sont montés sur trois vis ce qui permet d'ajuster leur inclinaison. Modèle assez rare dans cette finition naturelle, il est resté au catalogue de 1975 à 1978 et est assez peu connu aujourd'hui, et si les autres modèles cachent la lutherie avec des finitions de couleur, l'ET-290 N s'avère de relativement bonne facture.