Restauration de ma Framus de 1963

Retour sur la restauration de ma quart de caisse Framus vintage, cet article fait suite à celui sur les guitares vintage. Je vais revenir ici sur un bref historique de la marque, puis après un état des lieux je détaillerai la réfection du manche.

La FRAnconienne MUSicale

La Framus née officiellement au sortir de la seconde guerre mondiale, le 1er janvier 1946 avec comme fondateur Fred Wilfer.

La compagnie est constituée au départ d’une fédération de luthiers originaires de Bohème, ayant fuit leurs pays d’origine et l’Est, en partie grâce à Wilfer! (Une histoire incroyable relatée en détail dans les numéros 19, 20 et 21 du magazine “Vintage Guitare”)

L’activité de la compagnie devient prospère au cours des années 50, avec des guitares de jazz, dont la construction est largement influencée par les luthiers bohémiens et leur savoir-faire des instruments du quatuor. Mais aussi car Framus prends très tôt au sérieux la question de l’électrification, ainsi émerge des modèles comme le lapsteel Waikiki où encore la bass Triumph.

S’ensuit une période florissante ou Framus va désormais exporter en Angleterre.  C’est aussi une période ou l’on développe des modèles phares grâce a de judicieux partenariats, avec Billy Lorento ou Helmut Schaller. Framus développe avec ce dernier la plaque “Truesound”, permettant d’électrifier les guitares de jazz, équivalent au Mc Carty unit de chez Gibson. Framus réalise avec Lorento la guitare très réussie qui porte son nom. 

Dans les années 50, Framus se penche également vers les solidbody puis vers des guitares thinline à la fin des années 50.

Cette période du début des sixties est un savant mélange d’héritage de lutherie traditionnelle et d’influence anglo-saxonne, ma New Sound est datée de février 1963, et de tout ce que j’ai pu voir, les mêmes modèles ne présentent tous le même accastillage, et à partir du milieu des années 60, beaucoup de manches multiplis contre-collés apparaissent, ils ne sont alors plus vissé mais collé.

La série de solidbody ne cache pas son influence et se nomme “strato series”! Il en existe d’innombrable versions, à un, deux ou trois micros, elles vont connaître une fiévreuse poussée de boutons sur leur pickguard à mesure du temps.

Il est parfois difficile de s’y retrouver mais un site dédié au Framus vintage répertorie tous les modèles et donne une succincte description:  https://www.framus-vintage.de/

Les années 60 vont être l’apogée de la Framus, canet de commande pleins, l’usine de Bubbenreuth s’agrandit encore, mais à partir de 1966, la production est de plus en plus pensée à l’économie. Le déclin est amorcé face à la chute des commandes et de la concurrence asiatique, même si la direction compense la baisse de la production par une hausse de la qualité, la Framus est dissoute en 1976.

La restauration

Comme je l’avais décris dans l’article sur les guitares vintages  ma Framus est arrivée dans un état moyen mais surtout injouable. ( http://www.marionnaltov.com/guitare-vintage-graal-ou-legende-urbaine/)

Première constatation, elle a été beaucoup jouée, en témoigne la touche creusée, ce qui est un bon point; en revanche et au vue de son état: elle n’a pas joué depuis longtemps, ce qui n’est pas un bon point!

La partie corps est relativement sain, hormis quelques coups sans incidence, il n’y a guère qu’un léger décollement de la table à reprendre. Le manche est lui en piteux état: les frettes présentent une usure… prononcée! La touche a été reprise très grossièrement à la rappe et présente de profondes griffures. Autre gros point noir, le truss rod est foiré. Je me suis aperçu aussi qu’il y avait eu une réparation du manche, il a été percé de part en part au niveau de la 13ème case pour mettre deux grosses vis, cette réparation collé vissé a modifié le renversement du manche, qui rend la guitare impossible à régler.

A ce stade il faut décoller le manche, mais devant plusieurs tentatives infructueuses je décide de changer mon fusil d’épaule. Comme le décoller est impossible et que le trussrod est foiré j’opte pour une solution radicale: refaire un nouveau manche, mais comme la tête est rapportée j’entreprends de la démonter pour conserver un maximum de parties d’origine.

Je démonte alors minutieusement la tête et réalise un nouveau manche certes, mais avec du bois ancien, j’ai pour ce faire un acajou des années 50 qui ira parfaitement pour ce projet. Je prends la liberté de réaliser un collage avec mon acajou que je refend pour y insérer du merisier et de l’érable anciens eux aussi. 

S’ensuit un resurfaçage au niveau de la jointure corps/manche et je recreuse également la queue d’aronde femelle pour un assemblage parfaitement ajusté. Je reprends le renversement de la tête d’origine et je la colle au nouveau manche. J’intègre un trussrod double action avant de poser la touche, qui aura un radius de 12 pouces et des frettes vintage. Après la taille minutieuse de la queue d’aronde mâle dans le manche, je recolle celui-ci à la caisse à la colle de poisson.

Après un nettoyage complet du vernis, de l’électronique et de l’accastillage, je remonte la guitare et réalise un sillet en os sur mesure avant d’entreprendre les réglages.

Galerie de la restauration

En conclusion

Ma guitare est désormais jouable, la touche polie, les frettes neuves et planifiées permettent une action basse et un grand confort de jeu, c’est aujourd’hui un régal mais cela m’a demandé pas mal de temps! J’ai refait un manche avec un profil assez rond et en acajou conforme à l’origine mais j’ai pris la liberté de réaliser un collage avec différentes essences au milieu, ainsi que de finir la touche en accolade comme les guitares de jazz du milieu XXème. Si j’ai pu retrouver un logo ainsi qu’un sélecteur conforme sur le site de Framus, j’ai opté pour un cordier fixe et de type Epiphone frequensator, question de goût et c’est réversible.